Bribes d’un périple aventureux sur la route de la soie, KIRGHIZSTAN

KIRGHIZSTAN

LES CADEAUX DE L’ERRANCE

Je quitte le village d’Arslanbob, village aux légendes fabuleuses, et rejoins la petite cité d’Özgön, près de la ville d’Osh, à la frontière avec l’Ouzbékistan. Une étape à Özgön m’apparaît comme un voyage dans le temps. Ancienne capitale Karakhanide au dixième et au onzième siècle, la cité historique renferme quatre édifices de toute beauté, préservés des outrages du temps et des conquêtes. Sous un soleil euphorique, je déambule vers le minaret orné de décorations majestueuses d’un art révolu, sculptures gracieuses en brique, en terre cuite, pour rejoindre trois mausolées aux façades décorées de fresques, de dessins, d’incrustations, d’ornementations fascinantes dont les teintes couleurs terre-fauve s’accentuent sous le soleil de midi. Ces trois mausolées semblent triompher des méandres du temps. Ils trônent sous les voiles de chaleur blanche, sur une terrasse qui surplombe la ville aux toits rouge ou argent et les collines aux tons rouillés. Une solitude piquante m’enveloppe comme la brise naissante. Je m’en retourne au bazar qui ressemble à un grand marché ouzbek, où des pyramides de fruits secs se dressent sur des étals aux couleurs attrayantes. Une femme originaire de Samarcande me salue avec un débordement d’émotion et m’offre un sachet rempli de pistaches, d’amandes, de raisins noirs, d’abricots secs. Pour me souhaiter un beau voyage, me mine-t-elle avec les mains. Une Babouchka opulente aux yeux perçants, me conduit vers son échoppe, choisit une pomme rouge et une belle poire, me les tend comme une offrande, et me remercie de ma visite, les larmes aux yeux. Je m’incline en signe de remerciements, la main sur le cœur, des frissons dans la voix, l’âme en petits morceaux. Je déambule au hasard des allées, longe celles des tissus et décorations d’intérieurs, où des coussins brodés de motifs rouge, rose ou orange et des couvre-lits splendides dansent au rythme des passants. Admirative, je m’arrête et regarde. Une dame souriante me salue de la main, me présente une housse à coussin colorée ravissante, et me la tend alors que je m’extasie. Alors que je vais pour la reposer, la dame avec un élan de bonté surprenant me la dépose dans les mains, en cadeau. « En souvenir de la cité antique d’Özgön ! », lance-t-elle avec une voix fragile et teintée d’émotion. Je sens mon cœur battre fort contre ma poitrine, les larmes montent sans que cette fois je ne puisse les retenir. Cette générosité me perce l’âme. Elle semble protéger mes pas en ces terres inconnues pour mon long voyage vers le sud.

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